Énoncé des faits :
À la suite d’une pétition initiée par l’UNI, Yassine Lakhnech a décidé de retirer plusieurs inscriptions artistiques apposées sur les parois vitrées de la galerie des amphithéâtres, dans le bâtiment Pierre Mendès France.
Ces inscriptions, réalisées dans le cadre du « Mois de l’égalité » organisé en mars, font partie d’un projet artistique mobilisant étudiants et personnels de l’université contre le racisme et les discriminations. L’artiste « Petite Poissone », une Grenobloise de 42 ans, a encadré les ateliers au cours desquels ces messages ont été créés. Environ quarante messages engagés ont été affichés dans la galerie.
L’UNI a vivement dénoncé ces œuvres, les qualifiant de «propagande anti-blancs». Le délégué national du syndicat, Yvenn Le Coz, a estimé que ces messages « encouragent un racisme à l’encontre des personnes blanches et diffusent une idéologie ‘woke’ selon laquelle notre société serait structurellement raciste », réclamant leur retrait auprès de l’administration universitaire.
Le président s’est alors exécuté suivant les injonctions de l’UNI. Il a déclaré au journal Le FIGARO et dans un communiqué de presse: « Le contenu des messages a été élaboré lors d’ateliers artistiques par des personnels et des étudiants. Leur contenu n’est pas à l’initiative de l’établissement. Malheureusement, certains messages ont échappé à la vigilance de l’Université et sont incompatibles avec les valeurs et les principes républicains que l’université incarne ».
Dans le même temps la page wikipedia de « Petite Poissone » a fait l’objet de modifications insultantes.
Notre analyse
Cette attaque de l’UNI contre les libertés académiques et artistiques est organisée minutieusement. Elle concerne ces dernières semaines de nombreuses universités en France et présente dans sa forme et les thématiques ciblées, des similitudes avec les actions de l’extrême droite américaine contre les universités. Rappelons qu’à Grenoble, le représentant de l’UNI a été aux législatives de 2024, candidat suppléant pour le RN.
Le président de l’université en acceptant la demande de l’UNI a fait une double faute.
- En premier lieu, il a pris la décision seul sans en référer à aucune des instances de l’université (Directoire, CA, CaC). Cela pose un problème grave. Soit les messages en question tombent sous le coup de la loi et il se doit de porter l’affaire devant les instances judiciaires et disciplinaires compétentes, soit ce n’est pas le cas et il porte atteinte à la liberté artistique, composante majeure de la liberté d’expression, d’autant plus qu’il s’agissait d’un travail collectif des personnels et des étudiants de l’UGA.
- En cas de doute sur les messages inscrits, le président aurait dû à minima porter l’affaire devant le comité d’éthique de l’UGA pour statuer sur ce cas. Il aurait également pu prendre les avis du directoire et du CA. Cela illustre parfaitement la conception du pouvoir qu’à Yassine Lakhnech, autoritaire, solitaire et autocratique. Dans le cas présent, l’urgence de la décision ne pouvait être caractérisée puisqu’il semble que ces œuvres étaient affichées depuis 2 mois.
Le président montre une fois encore son traitement asymétrique des questions éthiques à l’université. Les exemples des conférences récentes de Rima Hassan, Alain Bauer et Hanane Mansouri où le président a été plus que complaisant avec des personnalités controversées et d’extrême droite alors qu’il a demandé des conditions restrictives à la conférence de Rima Hassan est particulièrement parlant.
En conclusion
Nous constatons — et l’avons déjà souligné à plusieurs reprises — une dérive vers l’extrême droite du président et de tout ou partie de l’équipe présidentielle, ainsi qu’un mépris caractérisé pour les instances collectives de l’université.
En agissant ainsi, le président de l’université — élu grâce à la voix de l’UNI au CA — se rend complice des attaques contre les libertés artistiques et académiques que mène l’extrême droite trumpiste partout dans le monde. Il alimente le climat délétère qu’entretient sa composante française, dont l’UNI fait partie.
En retirant, sans discussion, des œuvres d’art élaborées par des membres du personnel et des étudiants, il montre son mépris pour le travail des membres de la communauté universitaire.
UGA en commun dénonce fermement le mode de prise de décision autocratique du président et sa participation de fait à l’entreprise de destruction des libertés académiques, artistiques et plus largement de la liberté d’expression.
UGA en commun souligne de plus la responsabilité de la VP à l’égalité des chances et du VP culture et culture scientifique forcément concernés par ce dossier et qui à l’heure actuelle ne se sont pas désolidarisés de la décision du président.
UGA en commun exprime par ailleurs son soutien à « Petite Poissone » attaquée par des mentions insultantes sur sa fiche wikipedia.
Quant au fond des messages qui, selon le président, posaient problème, nous renvoyons les lecteurs aux nombreuses références académiques sérieuses qui soulignent actuellement l’asymétrie de traitement par les institutions des diverses catégories de population. Provoquer sur ces questions – un des rôles de l’art contemporain – pour susciter du débat est sans doute salutaire.
Par cette action, l’UGA est bien loin d’incarner les valeurs et principes républicains tels que revendiqués par le président.