C’était promis, juré, par la présidence de l’UGA. Un « cadre clair » devait être adopté, surtout à l’approche des périodes électorales pour que dans l’avenir ne puisse se tenir à l’université une conférence polémique sans avoir des garanties des organisateurs sur la pluralité des points de vue exposés et la présence d’universitaires spécialistes de la question en tribune.
Pourtant le 2 octobre à 19h s’est tenue dans l’amphi 1 de la galerie des amphis Pierre Mendès France une conférence sur le « laxisme pénal » organisée par le Cercle Droit & Liberté.
En apparence, les étudiantes et étudiants conviés à cette conférence pouvaient penser qu’il s’agissait d’une conférence informative sur les évolutions du droit pénal, organisée par un étudiant en L3 de droit, avec deux avocats pénalistes des barreaux de Grenoble et de Lyon. Mais voilà cette conférence est une nouvelle illustration de l’entrisme des réseaux conservateurs à l’Université, en particulier dans les facultés de droit.
En effet le Cercle Droit & Liberté n’est, nullement, « une association indépendante qui regroupe des professionnels du droit et des étudiants soucieux d’encourager l’esprit critique et de promouvoir les libertés publiques et le bien commun dans la Cité », comme elle se présente sur son site. Sa seule action en la matière est d’avoir demandé au Conseil d’Etat l’annulation du décret interdisant de fumer sur les… plages publiques, comme le mentionne un journal d’extrême-droite. Et ce cénacle de juristes conservateurs et réactionnaires se gardent bien de dire qu’ils sont financés par le milliardaire Pierre-Edouard Stérin dans le cadre de son projet « Périclès » afin de mener une « guérilla juridique » devant les juridictions françaises pour faire barrage à toute initiative progressiste – comme l’ont fait les lobbies juridiques conservateurs pro-Trump aux Etats-Unis. Précisément, Mr Stérin se positionne contre le droit à l’avortement, prône la “remigration” et finance avec des millions d’euros des initiatives visant à “servir et sauver la France”. Son ambition avouée est de porter au pouvoir des idées ultralibérales, traditionalistes et identitaires.
Les organisateurs de la conférence se sont également bien abstenus de mentionner que le « président du CDL Grenoble » qui a organisé cette conférence n’est autre qu’un représentant de l’UNI, qui a été, lors des législatives partielles dans la première circonscription de Grenoble, le suppléant d’Alexandre Lacroix, candidat UDR-RN. Et s’agissant des deux avocats conférenciers, au-delà de leurs connaissances du « laxisme pénal », idée qu’ils n’ont même pas défendu lors de la conférence, ils sont surtout connus, pour l’un, pour son soutien à Alain Carignon et l’autre avoir été maire et conseiller départemental Les Républicains de la Tour-du-Pin.
Pour rappel, le président de l’Université, Yassine Lakhnech, avait autorisé la tenue, le 28 mars 2025, d’une conférence animée par Mme Hanane Mansouri, députée de l’Union des Droites pour la République et ancienne élue de l’Union Nationale Inter-universitaire (UNI). Contrairement aux exigences mises en place pour d’autres conférences, comme celle de l’eurodéputée Rima Hassan, aucune obligation d’un discutant scientifique n’avait été nécessaire pour cet événement.
La conférence de Mme Mansouri, dont on peut critiquer la profondeur intellectuelle, avait par ailleurs nécessité une mobilisation significative des forces de l’ordre pour encadrer une manifestation estudiantine ; pas moins d’une douzaine de camions de CRS étaient présents devant environ cinquante étudiants manifestants. La scène était ridicule pour ne pas dire pathétique.
Nous avions alors interpellé la présidence, soulignant l’urgence de la mise en place d’un groupe de travail multi-commission au sein de l’UGA pour établir des règles claires concernant les débats universitaires. Il est crucial d’intégrer des discutants scientifiques aux conférences afin de garantir des échanges de qualité. L’université doit demeurer un lieu de pensée critique et de débat constructif. La communauté universitaire doit se questionner sur les valeurs qu’elle souhaite défendre et sur les moyens de les protéger.
Tout cela n’aurait jamais dû se reproduire ! Nous réitérons notre demande de construire avec les élus des conseils centraux le cadre clair qui a été promis par la présidence.